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Le rude combat des astronomes pour se préserver des constellations de satellites

Une attraction inédite était apparue dans le ciel nocturne en 2019 après les premiers lancements, par grappes de soixante, des engins de Starlink, société d’Elon Musk qui fournit Internet depuis l’espace par le biais d’une mégaconstellation de satellites. Ces derniers, en s’installant sur leur orbite basse, à quelques centaines de kilomètres de la Terre, se suivaient les uns derrière les autres et formaient des pointillés sur le jais céleste. Même si le Soleil venait de se coucher, il était encore assez proche de l’horizon pour que ses rayons se reflètent sur les satellites de Starlink. Le spectacle était saisissant, mais il a consterné les astronomes.
En effet, leurs télescopes produisaient des photos rayées par le passage des trains d’engins spatiaux. Avec la perspective de voir Starlink mettre en orbite jusqu’à 42 000 satellites, sans compter le lancement programmé d’autres mégaconstellations, le danger était réel de perdre le ciel dit « astronomique », gâché par une pollution lumineuse tombée de l’espace. Même si la plupart des scientifiques exploitent des instruments se concentrant sur de minuscules parties du cosmos, avec un risque faible de voir un satellite traverser le champ de vue, la communauté s’inquiétait pour une future installation majeure : l’observatoire Vera-Rubin, dont le coût de construction, au Chili, avoisine les 600 millions de dollars (environ 570 millions d’euros), doit entrer en service en 2025.
Doté d’un grand champ, il « scannera » l’intégralité du ciel austral tous les trois jours. Le Vera-Rubin a, en effet, pour mission principale de repérer tout ce qui change ou bouge dans le cosmos, de la supernova – l’explosion d’une étoile – qui s’allume dans une autre galaxie jusqu’à l’astéroïde qui s’approche de la Terre. A fortiori, il détectera tous les satellites artificiels. Des simulations ont montré que, prenant mille photos par nuit avec un temps de pause de 30 secondes, le Vera-Rubin verra 10 % de ses clichés gâchés par le passage d’engins spatiaux. Et ce taux dépassera les 50 % au crépuscule et avant l’aube. Encore ces simulations ne se basent-elles que sur un nombre de 40 000 satellites, qui risque d’être bien inférieur à la réalité du futur, étant donné toutes les mégaconstellations prévues.
Depuis 2019, la communauté des astronomes s’est donc mobilisée pour tenter de maintenir cette pollution dans des proportions acceptables. « Nous avons tendu la main aux opérateurs des constellations, pour discuter », explique Eric Lagadec, astrophysicien à l’Observatoire de la Côte d’Azur à Nice. L’idée première consistait à réduire au maximum la brillance des satellites. Starlink a ainsi modifié le revêtement de ses engins et l’orientation de leurs panneaux solaires pour que moins de lumière soit réfléchie vers le sol. Mais ces efforts louables ne sont pas suffisants, tout simplement en raison de la sensibilité extrême des télescopes modernes : les satellites « assombris » restent des millions de fois plus brillants que les cibles traquées par les observatoires.
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